HENRIETTA M. RILEY TRUST

La Henrietta M Riley Trust est une société de fonds d'investissement basée à Détroit qui fut créée vers 1970. Comme l'ont prouvé des documents publics de déclaration fiscale, cette société, enregistrée comme un organisme de bienfaisance, est en lien étroit avec la Société Watch Tower puisqu'elle lui apporte des revenus. Compte tenu du des implications commerciales et financières de cette démarche, ainsi que de la nature de certaines des entreprises liées à la fiducie, cette affaire est souvent considérée par des critiques comme constituant un compromis de la part de la Watch Tower, eu égard aux règles formulées dans ses propres publications.

 

Sommaire

1 Présentation

2 Controverses

  • 2.1 Immixtion dans les affaires du monde
  • 2.2 Nature de certaines des entreprises   

3 Références

 

Présentation

Des documents publics de comptabilité, et particulièrement le formulaire 990 qui détaille l'activité de Henrietta M Riley Trust pour l'année écoulée, révèlent que cette fiducie a pour objectif de "soutenir la Watch Tower Bible & Tract Society", et qu'il s'agit de son but premier, à tel point que le nom du trust est, sur chacun des documents, intimement lié à celui de la Watch Tower ("H.M. Riley Tr. for Watch Tower Bible"). Concrètement, la fiducie apporte annuellement à l'organisation religieuse des revenus provenant des avoirs laissés par Mme Henrietta Riley, qui est à l'origine du trust. L'identité de cette dame aujourd'hui décédée reste inconnue, mais peut-être s'agissait-il d'une adepte fortunée qui souhaitait ainsi faire de la Société Watch Tower la seule bénéficiaire du revenu de son trust. La page 16 du document de 2006 indique qu'il n'existe aucune relation entre le donateur et le donataire.

 

Les revenus ainsi générés sont issus de deux sources principales : la majorité est constituée de redevances sur le pétrole et le gaz, et la seconde, qui représente environ deux millions de dollars suivant l'exercice, provient d'investissements dans de nombreuses entreprises spécialisées dans des domaines très divers. Ces revenus sont ensuite transférés à la Société Watch Tower sous forme de dons, et comme indiqué dans les documents, cette dernière dispose de toute latitude en ce qui concerne l'utilisation de cet argent. La Société Watch Tower n'achète pas de stock issu de ces entreprises, mais reçoit de l'argent, et cela se poursuit encore en 2010.

 

À titre d'exemple, pour l'exercice de l'année se clôturant le 30 avril 2002, la fiducie généra des revenus dont le montant atteignirent 1 740 127 $, et finalement la somme de 1 945 645 $ fut donné à la Société Watch Tower. En comparaison, pour l'année 2001, le trust produisit 2 939 731 $ de revenus, et le don à la Société s'éleva à 3 285 050 $. La différence entre les recettes et les dépenses est obtenue grâce à des gains sur les actifs détenus.

Page d'accueil du formulaire 990 de la fiducie, présentant l'activité pour l'année se terminant le 30 avril 2002.


















                                                                                             

Deuxième page du même formulaire indiquant que le but principal de la fiducie est le "soutien à la Watch Tower Bible and Tract Society".


Controverses

 

Immixtion dans les affaires du monde

La déclaration annuelle de la fiducie fournit les détails sur ses revenus et les actifs de placement détenus à la fin de l'année. Il existe une variété d'investissements dans des sociétés qui diffèrent suivant les années, et qui incluent entre autres :

 

Année Nom de l'entreprise Domaine(s) d'activités
2002 Exxon Mobil Pétrole et gaz
Coca Cola Boisson gazeuse
Barclay's Banque
JDS Uniphase Optique
Proctor & Gamble Hygiène et produits de beauté
Philip Morris Tabac   
2006 Harley Davidson Motocyclettes
Pfizer Produits pharmaceutiques
MBNA Banque
Bank of America Banque
Bed Bath & Beyond Indice boursier NASDAQ-100
Colgate-Palmolive Hygiène: savons, détergents, dentifrices, brosses à dents
Wal-Mart Grande distribution
Exxon Mobil Prétole et gaz
Johnson & Johnson Produits pharmaceutiques
Microsoft Informatique

 

Des adeptes de la Société Watch Tower estiment que si celle-ci "peut mettre de l'argent à bon escient, il est parfaitement acceptable pour elle de le faire".[1] Or, cet argument est irrecevable car la littérature de l'organisation indique clairement que, selon elle, la vraie religion ne peut pas s'immiscer dans des activités commerciales, domaine qu'elle considère comme étant sous la coupe du Diable, et dénonce les placements réalisés par d'autres religions, notamment l'Église Catholique.

Par exemple, sous le titre "Les Églises dans les affaires", le Réveillez-vous! du 8 juin 1970, pp. 21-23, déclarait qu'un livre de Nino Lo Bello, L'Or du Vatican, avait "rassemblé des preuves montrant que les capitaux du Vatican investis dans diverses entreprises constituent une somme prodigieuse". Il est dit ensuite :

« [Le Vatican] se sert souvent d'une société qui lui appartient pour devenir le principal actionnaire dans de nombreuses autres entreprises, dissimulant ainsi, jusqu'à un certain point, ses intérêts dans celles-ci. Par exemple, le Vatican est le principal actionnaire de l'Italgas, société qui a l'exclusivité de la distribution du gaz domestique dans trente-six villes italiennes. Cependant, à son tour, cette société en contrôle onze autres qui sont productrices de goudron, d'anhydrides, de minerai de fer, de phosphore, de coke, de produits de distillation, d'eau potable, d'installations de chauffage, de réchauds et d’autres appareils à gaz, ainsi que de fours industriels. (...) Les vastes intérêts financiers du Vatican et d'autres organisations religieuses les rattachent étroitement au monde des affaires. Quel contraste ces organisations offrent avec les vrais chrétiens dont Jésus déclara : "Ils ne font pas partie du monde" (Jean 17:16). L'organisation religieuse qui sert réellement Dieu en harmonie avec l'exemple laissé par Jésus-Christ (...) ne s'occupe pas d'affaires commerciales. Conformément à l'ordre donné par la Bible, elle ne se mêle pas aux "affaires commerciales de la vie" (2 Timothée 2:4). »
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De même, le livre La Révélation : Le grand dénouement est proche !, publié en 1988, dit à la page 264 :

« Au contraire, la religion d'origine babylonienne entretient souvent des rapports équivoques avec le monde des affaires. (...) L'administrateur financier de l'archidiocèse catholique de Miami (États-Unis) reconnaissait que l'Église possède des actions dans des sociétés productrices d'armes nucléaires, de films classés X, et de cigarettes. »

 

Et pourtant, c'est exactement ce que fait la Société Watch Tower: elle est la seule bénéficiaire de la fiducie Henrietta M Riley, qui elle-même détient des investissements dans des sociétés produisant de nombreux biens dans des domaines très variés. En fait, seule l'envergure des profits diffère entre les placements de l'Église Catholique et ceux de la Société Watch Tower, mais le principe est le même. Par ses propres déclarations, la Watch Tower se condamne: elle "fait partie du monde" et se mêle des "affaires commerciales de la vie", ce qui ne l'identifie pas à "l'organisation religieuse qui sert réellement Dieu en harmonie avec l'exemple laissé par Jésus-Christ", mais plutôt à "la religion d'origine babylonienne".

 

Nature de certaines des entreprises   

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Page du formulaire mentionnant Philip Morris


Parmi la liste des entreprises figurant dans les déclarations fiscales, on peut remarquer la présence de Phillip Morris Companies Inc. Cela est problématique, car voici ce qu'on peut lire sur le site de la compagnie :

« Philip Morris International (PMI) est la principale société de tabac au monde, avec des produits vendus dans environ 180 pays. En 2010, nous avons tenu environ 16,0 parts pour cent du marché international des cigarettes hors total des États-Unis, soit 27,6 pour cent à l'exclusion de la République populaire de Chine et les États-Unis. Nos activités au jour le jour impliquent plus que la fabrication des cigarettes, ils concernent aussi la façon dont nous menons nos affaires et interagissent avec le monde hors de nos bureaux. »

De nombreuses publications indiquent que la Watch Tower considère le tabagisme comme étant contraire aux principes bibliques, notamment 2 Corinthiens 7:1; de ce fait, un Témoin de Jéhovah ne peut ni fumer, ni détenir des parts dans l'industrie du tabac, ni travailler dans une firme en rapport avec le tabac, et cela sous peine d'exclusion.

 

 

Publication Contenu et commentaire
Réveillez-vous ! (anglais), 8 février 1962, pp. 21-23 "Quand il sait qu'une entreprise est entièrement consacré à de la marchandise qui est employé dans un but moralement mauvais, il serait incorrect pour lui qu'il viole sa conscience en investissant de l'argent dans le stock de cette compagnie".[2]

=> Philip Morris est entièrement consacré au tabac, pratique que la Watch Tower condamne clairement. Ainsi, elle agit en contradiction avec le principe qu'elle-même énonce.

Les Témoins de Jéhovah : Prédicateurs du Royaume de Dieu, 1993, p. 181 "À partir de 1973, (...) un fumeur ne pouvait plus se faire baptiser. Les mois suivants, on a aidé ceux dont le travail avait un rapport avec la production ou la vente de tabac à comprendre qu'ils ne pouvaient demeurer dans cette situation et être acceptés comme Témoins de Jéhovah. Les conseils de la Parole de Dieu doivent être appliqués dans tous les aspects de la vie sans exception."
Réveillez-vous !, 8 octobre 1995, p. 28 L'article reproche les investissements du Vatican dans le tabac et cite un prêtre interrogeant le pape : "Pourquoi le Vatican vend-il encore des cigarettes ? (...) Ce commerce est en contradiction avec vos appels constants en faveur de la protection de la santé et avec notre activité pastorale."

=> De même, la Watch Tower est contradictoire puisqu'elle enseigne le rejet de tout emploi lié au tabac et dans le même temps tire profit d'une firme dont c'est la seule activité.

La Tour de Garde, 15 avril 1999, p. 29 "Il en va tout à fait différemment de l'employé qui, dans le même magasin, s'occupe du comptoir où se vend le tabac. Tout son travail, jour après jour, se rapporte à un produit que les croyances chrétiennes condamnent. (...) Quand il choisit un emploi, un chrétien doit réfléchir à la mesure dans laquelle cet emploi l'obligera à s'impliquer et à la fréquence à laquelle il aura à s'occuper de choses contraires à la Bible."

=> Or, il s'avère que Philip Morris, qui fournit une somme d'argent à la Watch Tower, n'exerce son activité que dans le domaine du tabac. L'organisation pourrait donc être exclue, sur la base de ses propres critères.

 

Certes, on pourrait arguer qu'il y a bien un intermédiaire, la fiducie, entre les entreprises dont le domaine de spécialisation est considéré comme non-chrétien par la Watch Tower, puisque celle-ci reçoit l'argent de la fondation et non directement des actions détenues par la fiducie. Mais cela ne change est rien le problème, car la Watch Tower sait forcément, depuis le temps que les documents sont librement disponibles sur Internet, d'où ces revenus proviennent et pourrait tout à fait les refuser.

 

Des défenseurs de l'organisation également peuvent rétorquer que la Watch Tower n'a probablement pas demandé de détenir des actions dans le tabac, et qu'elle n'a pas précisé aux administrateurs de la fiducie dans quelles entreprises il ne fallait pas investir. Mais, d'une part, comme cela indiqué sur les bordereaux, l'ensemble des transactions est géré par une banque, la Comerica Bank, et non pas par un quelconque directoire. D'autre part, la Watch Tower pouvait très bien expliquer que, d'un point de vue éthique, elle ne pouvait pas accepter ces revenus; il va de soi que le bénéficiaire d'une fiducie n'a pas un rôle totalement passif et garde le contrôle sur ses rentrées d'argent.

 

Enfin, s'il est vrai que l'investissement dans la compagnie de tabac est relativement faible par rapport au montant total du revenu fourni par la fiducie, cela ne change rien au principe : au final, la Watch Tower a bel et bien bénéficié d'un revenu provenant d'une entreprise qui dirige ses activités dans un domaine qu'elle-même juge inconcevable pour un chrétien. Selon ses publications, un adepte se serait compromis s'il conservait un emploi dans ce domaine, même son but n'était que de pourvoir aux besoins de sa famille. Or, la Watch Tower est loin d'être pauvre et pourrait se passer sans problème de ce revenu à la provenance douteuse.

 

Cette affaire est révélatrice de l'hypocrisie de l'organisation qui interdit à ses membres, sous peine de sanctions, quelque chose qui ne devient plus problématique lorsque c'est elle qui le fait, et critique les autres religions et les condamne pour des actions qu'elle-même s'autorise lorsque cela lui permet d'en tirer un profit financier.

 

Références

  1. (en) "False accusations of political and commercial involvement", sur watchtower21.org, 27 septembre 2010. Consulté le 23 février 2011
  2. Original en anglais :
    « When he knows that a corporation is devoted entirely to manufacturing merchandise that is used for a morally wrong purpose, it would be improper for him to violate his conscience by investing money in the stock of that company. »

Source : http://www.tj-encyclopedie.org